Soutien à Globe42 - Tech-activism
Depuis un an Ninja Squad donne de son temps pour le développement d’un logiciel un peu particulier. Il s’agit d’un outil sécurisé pour une association, Globe 42 qui propose un espace d’éducation populaire et de santé communautaire pour des personnes migrantes agées. Ninja Squad avait envie d’aider bénévolement cette association qui n’avait pas les moyens de s’offrir le développement d’une application permettant de simplifier leur quotidien.
Présentation de l’association Globe42
Mais qu’entend-on par « santé communautaire » ? D’après l’OMS c’est un « processus par lequel les membres d’une collectivité, géographique ou sociale, conscients de leur appartenance à un même groupe, réfléchissent en commun sur les problèmes de leur santé, expriment leurs besoins prioritaires et participent activement à la mise en place, au déroulement et à l’évaluation des activités les plus aptes à répondre à ces priorités ». L’approche consiste donc à co-construire, avec les personnes qui ont besoin de soins, les bons outils et les bonnes pratiques pour faire en sorte qu’elles aillent réellement mieux. Par exemple, quand un migrant qui parle mal le français et ne le lit pas, voit un médecin : comment faire en sorte qu’il comprenne bien le contenu de l’ordonnance, qu’il change ses pratiques alimentaires si besoin. Ce n’est pas simple à envisager si la prescription s’arrête à la visite d’un quart d’heure dans le cabinet médical. D’où l’idée d’un espace communautaire, où on peut à la fois apprendre le français, parler avec des personnes qui sont dans la même situation, partager un repas, des moments de convivialité, et apprendre à mieux prendre soin de soi.
Malika Lebbal a lancé cette association après plusieurs années de missions classiques d’assistante sociale, et plusieurs années également de bénévolat au sein d’un collectif de soutien pour des sans-papiers.
Après 15 années d’expérience, Malika voulait donc se lancer dans un projet différent, un espace de santé communautaire, bienveillant, où on dépasse les positions parfois trop éloignées entre travailleurs sociaux et personnes qui ont besoin d’aide. Malika parle souvent d’un objectif de « partage de pouvoirs et de savoirs ». Elle s’est inspirée d’exemples comme La case de santé à Toulouse, La place de santé en Seine Saint-Denis, des centres de santé communautaire à Montréal ou à Bruxelles.
Globe42 nait ainsi en 2009 et se focalise rapidement sur les difficultés spécifiques des femmes migrantes âgées, sur le plan de l’accès aux droits et à la santé. L’association ouvre un local à Saint-Etienne, dans le quartier de Chavanelle, là où résident deux ninjas (ceux qui se sont reproduits, et qui ont leurs deux ninjas juniors dans l’école de quartier à 100 mètres du local de Globe42).
Malika a entrepris en 2012 une formation continue, un Master 2. Elle a entamé une recherche action sur le thème de la santé des femmes migrantes âgées. Le choix de la recherche action n’était pas anodin : elle souhaitait que les femmes soient actrices de la recherche, et voyait « la recherche action comme un outil conscientisant avec une démarche collective d’appropriation des données et d’élaboration de réponses adaptées ».
Haaaa mais ça parle de données… un vrai besoin de collecte de données « éthique » (anonymisée, sécurisée) apparaît donc, un truc de ninjas ça !
L’application
Les membres de l’association assuraient, jusqu’alors, la gestion de ces données sur leurs membres sans l’aide de l’informatique, pour écarter toute faille de confidentialité qu’un non-spécialiste peut craindre, notamment vis-à-vis du cloud. Il y avait donc une vraie perte de temps et surtout elles ne pouvaient pas croiser certains chiffres qui pouvaient les aider : combien de personnes se rendent aux repas, aux médiations de santé ? Combien de temps passent les membres de l’association sur la médiation sociale, sur l’accueil… ? Elles géraient sur des carnets de note papier le suivi de chaque migrant : les procédures en préfecture, l’état d’avancement des demandes de cartes de séjour, bref, toutes ces informations étaient non informatisées !
Nous avons voulu donc aider cette association en proposant bénévolement nos services de développeurs. Non seulement nous nous offrions un side-project pour pratiquer les technologies du moment (Angular 6, Spring Boot 2, Kotlin, JUnit 5, …) sur une vraie application, mais nous en profitions pour aider une association qui le méritait, et dont on pouvait ainsi faciliter le travail.
Si cela vous intéresse, le code est sur Github. Merci au passage à Clever Cloud qui a accepté de donner une instance gratuite pour l’hébergement de l’application.
Le travail des ninjas
Il est compliqué de dire exactement combien de temps cela nous a pris, 70 à 80 jours peut-être depuis 18 mois, nous ne sommes pas des fans de l’imputation ! On s’est appliqués à suivre, comme dans n’importe quel projet corporate, un processus itératif : on passe du temps à discuter avec les membres de l’association, à comprendre leurs besoins (on participe aux repas du jeudi de l’association, qui mettent à l’honneur un plat d’un pays, cuisinés par une personne migrante et qui réunissent 20 à 30 personnes autour d’une grande tablée).
On est un peu plus calés sur les cartes de séjour maintenant, on se doutait bien qu’il n’était pas facile d’être une personne migrante, mais la complexité administrative pour obtenir des titres de séjour aujourd’hui en France est assez impressionnante. Une fois que les besoins de l’association sont énoncés, priorisés, on se donne quelques semaines pour les implémenter. On se rend de nouveau au local de l’association pour un échange avec les membres (on privilégie le point présentiel, jamais de remote) : on leur fait une démo de ce qu’on a produit, on récolte leur avis, et on prend en compte de nouveaux besoins. Et ainsi de suite, on réitére. Entre chaque rencontre, les membres de l’association utilisent vraiment les nouvelles fonctionnalités, au quotidien. Nous n’avons pas de serveur de recette, suite à la démo et à la correction éventuelle de certains points si nécessaire, on relivre une nouvelle version de l’application en production. Les membres de l’association sont passés ainsi d’un mode tout papier à un mode un peu plus hybride (il y a encore du papier mais beaucoup moins !), un mode beaucoup plus informatisé.
L’engagement des personnes de ce collectif est tellement fort qu’on se sent tout petits vis-à-vis d’elles. Notre implication sur ce projet autour de la santé des personnes migrantes agées est bien sûr modeste, mais c’est une grande satisfaction pour nous de voir qu’on peut les aider à être plus efficaces, on se rend compte à quel point l’application a pu leur faciliter la vie, et ça pour des développeurs c’est quand même chouette!
Vous aussi devenez tech-activist ✊
En tant que développeur, on se demande parfois comment on peut aider des personnes, des associations, des centres sociaux, comment on peut être utile sur des projets sociaux. Sachez que vos compétences techniques peuvent grandement aider. On peut vous garantir qu’il y a pléthore de demandes, il suffit de pousser la porte de certaines structures de votre quartier !
Idalin Bobé lors de la mémorable keynote à MiXiT, en 2016, sur le Tech Activism, nous avait amenés à réfléchir à cette question : quelle contribution sociétale voulons-nous apporter à travers notre métier ? Elle nous encourageait à mettre à disposition, ne serait-ce que quelques heures par mois, nos compétences au service de projets à impact sociétal ou environnemental.
On parle souvent des logiciels et applications, notamment ceux des GAFAM, qui introduisent des algorithmes régissant de manière souvent trop intrusive nos vies, qui peuvent parfois contribuer à ne pas faire en sorte que notre monde aille mieux. Et bien vous pouvez aussi contribuer, tout modestement cela soit-il, à inverser la tendance !